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L’un des premiers à avoir placé ce terme dans le débat n’est autre que Gabriel Attal. En poste à Matignon de janvier à août 2024, il déplorait les avantages qui poussaient les entreprises à recruter au Smic. Et ce, en raison des exonérations qui existent pour les employeurs sur les travailleurs payés au minimum. Sans favoriser les embauches avec une meilleure rémunération. Ce que les économistes appellent « la smicardisation ».
« Une trappe à bas salaire. », avait lâché le jeune Premier Ministre.
Mais avant lui, Elisabeth Borne avait déjà lancé la machine. En effet, l’an dernier, avant de quitter ses fonctions, elle avait commandé un rapport sur ce même sujet. Après plusieurs mois, Antoine Bozio (IPP) et Etienne Wasmer (Sciences Po) ont rendu leurs conclusions. Les deux économistes confirment la smicardisation qui frappe les travailleurs Français. Mais ils apportent aussi des suggestions, pour corriger le tir… D’où le titre du rapport qui sera présenté vendredi. À savoir : Les politiques d’exonérations de cotisations sociales : une inflexion nécessaire.
Smicardisation : comment faire reculer ce fléau ?
Dans un monde où tout coûte de plus en plus cher, les revenus qui stagnent posent un gros problème aux ménages. Mais il ne s’agit pas d’une fatalité. En effet, en France, le législateur a plusieurs leviers pour changer les comportements des entreprises. Avec une carotte (ou un bâton) : les cotisations. Ce que certains appellent le salaire indirect. Aujourd’hui, les patrons en paient moins quand ils embauchent au Smic. Aussi, la smicardisation qui nous pénalise aujourd’hui n’a rien d’une surprise.
« On constate un écrasement de la distribution des salaires, susceptible d’être lié à la forte dégressivité du barème des exonérations de cotisation et des retraits d’autres prestations sociales. », révèlent les auteurs du rapport.
Ces travaux sauront, sans aucun doute, éclairer la lanterne du nouveau Premier ministre. En effet, mardi dernier, Michel Barnier a évoqué le niveau (insuffisant) des salaires en France. Il va donc devoir réformer les politiques qui encadrent le marché de l’emploi. Le chômage n’atteint plus le même niveau qu’autrefois. Aussi, il est temps de changer de stratégie. D’autant que toutes ces mesures qui s’accumulent depuis des décennies ont débouché sur une vaste usine à gaz.
Finalement, la smicardisation coûte aussi cher à l’idée. Car avec des salaires médiocres, les ménages ont du mal à joindre les deux bouts. Et désormais, même les travailleurs comptent sur des aides sociales. À l’image de la prime d’activité. Un dispositif qui vient compléter les petits revenus des actifs.
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Quelles politiques publiques pour augmenter les salaires ?
Dans un contexte marqué par le déficit, on pourrait penser que le gouvernement songe à supprimer les exonérations de cotisations. Mais le rapport signé Antoine Bozio et Etienne Wasmer ne creuse pas cet angle. Il explore une piste à coût constant pour l’État. Tout en brisant un tabou ancré depuis des années.
« Nous proposons pour la première fois depuis 30 ans d’augmenter le coût du travail au Smic. »
Selon les deux experts, avec en faisant les choses petit à petit, on peut ainsi endiguer la smicardisation. Sans entraîner de hausse du chômage.
« Une inflexion est nécessaire pour faciliter la montée en gamme des emplois et des secteurs. », énonce le rapport en conclusion.
Une analyse partagée par la CGT, qui salue le travail de ces économistes.
« Pour la première fois depuis 30 longues années d’empilement de dispositifs d’exonérations de cotisations, un rapport commandé par le gouvernement reconnaît que” les politiques d’allègements de cotisation peuvent avoir conduit à une sur-spécialisation dans certains types d’emplois ou de secteurs à bas salaires, au détriment d’autres à plus forte valeur ajoutée. »
Cela dit, le syndicat reste méfiant, face à certaines propositions du rapport. Qui évoquent des exonérations pour l’embauche de jeunes travailleurs.
« Pour les moins de 26 ans, nous ne voulons pas de sous salaire ni en net, ni en brut »
Pour la CGT, pour réduire la smicardisation, il faut surtout sortir du :
« cercle vicieux des exonérations de cotisations sociales »
Affaire à suivre !